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Etre et avoir été (mère)

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Le « maternage proximal » de façon générale, l’allaitement, le cododo, le portage, l’éducation bienveillante, et les vaccins plus précisément sont source de débats pour le moins animés.
Le moins qu’on puisse dire c’est que comme tout débat qui se respecte, ça fait rejaillir un paquet de conneries ! Au-delà du clivage basique pour/contre, il y a des éléments factuels avérés.

Alors oui, le lait maternel est l’aliment le plus adapté pour ton gnome.
Même si tu n’as pas été allaité(e) et que tu n’en es pas mort(e).

Alors oui, les couches jetables contiennent des substances cacabeurk.
Même si tu as porté des Pamprout et que tu t’en portes très bien aujourd’hui.

Alors oui, les petits pots Blédibeurk sont aussi neutres que les lasagnes Find** si tu vois ce que je veux dire.
Même si tu as été élevé(e) aux purées industrielles et que visiblement, tu n’as pas(encore)  déclaré de CancerDuCul.

Et oui, tu es libre de laisser pleurer tes gosses, de leur mettre une fessée « mais uniquement quand ils l’ont bien méritée » (les petits veinards), de les coller dans un transat à 3 semaines de vie pour pouvoir te sentir femme, et pas que mère (pour ça, tu avais aussi l’option de ne pas enfanter, mais je dis ça, je ne dis rien …).

Et peut être que, comme toi, ils en sortiront (visiblement) indemnes. Ou peut être pas.

Faire de son cas individuel un argument est une maladie de plus en plus répandue.
Moi, je connais un gars qui fume depuis 20 ans et qui n’a pas de cancer. J’en déduis donc que tout ce qu’on dit sur la dangerosité des clopes, c’est uniquement pour culpabiliser les fumeurs.

Voilà où en est.
On ne peut plus avancer de faits sans se faire taxer d’extrêmisme, on ne peut plus conseiller une jeune maman sans passer pour une racoleuse, et surtout surtout OH MY GOD, il ne faut pas culpabiliser les gens.

Mais dis-moi un truc, quand je tombe sur des pubs avec des bébés au biberon, est-ce que je hurle à la culpabilisation des mamans allaitantes?
On m’a accusée il y a peu de temps d’être tombée dans une secte, d’avoir l’esprit fermé et de juger les mamans qui faisaient des choix différents des miens.

Sauf que ces gens là ne savent rien de ma vie. On va donc jouer aux jeu du 3615 MYMUMMYLIFE.

J’ai deux enfants, qui ont tous deux été élevés de façon assez différentes, au moins pour les premiers mois.

Ma première grossesse a été médicalisée de façon classique. Je revendiquais mon souhait de péridurale en arguant que mon bébé aurait une naissance plus agréable si je souffrais moins. Je le pensais sincèrement. J’ai été piquée. Ca n’a pas marché. J’ai souffert 13h durant. Il est né sous mes hurlements, une ventouse sur la tête.

Pour mon premier, l’allaitement coulait de source. Il est né, je l’ai mis au sein sans me poser aucune question. Un jour, le médecin m’a dit que mon fils de 6 mois mourait de faim et lui a collé un bibe de Gallia dans le bec. Il perdait du poids depuis quelques temps, je n’ai pas posé de question. J’ai souffert mille morts de ce sevrage brutal. Mon fils, lui l’a très bien vécu. Tant qu’il avait à bouffer, ça lui allait. Moi, beaucoup moins, mais là n’est pas la question.

Il a porté des couches lavables et des couches jetables. La nuit, pour partir en WE, quand Chouchou avait la flemme de mettre une lavable, quand la nounou oubliait de me rendre les couches sales. C’était aléatoire.

Il a dormi dans son lit à partir d’un mois. Et les rares fois où je cédais en le prenant avec moi, j’étais convaincue de faire la pire chose qui soit pour son avenir.

J’ai tenu bon pendant 5 minutes en le laissant pleurer, pour ne pas lui donner de mauvaises habitudes. J’ai tenté 7 minutes la fois suivante. Persuadée que je devais me faire violence. Pour son bien.

Sous la pression familiale, je l’ai laissé à deux mois, dans une maison inconnue, dans une chambre inconnue, pendant que je réveillonnais à quelques mètres de là, au salon. Mais ses hurlements ont eu raison de moi au bout de quelques courtes minutes et je l’ai pris avec moi, sous les regards désapprobateurs.

Il a été porté en BabyBeurk les premières semaines de sa vie, pour rester contre moi, pour se balader. Mais ça ne nous convenait pas. Alors on a pris la poussette.

Il a eu un trotteur dont j’ignorais les méfaits.

Mon fils n’a pas été battu. Mais j’ai un caractère de merde, et mon solde de patience est continuellement débiteur (comme mon compte en banque). Alors j’ai crié. Mis des tapes sur les mains. Sur les fesses aussi. J’ai interdit sans expliquer. Je l’ai empêché de faire des choses sans gravité, juste parce que « non ». Je l’ai mis au piquet à 18 mois pour avoir désobéi et fait un caprice.

Au hasard de mes lectures, je suis tombée sur des écrits qui m’ont touchée et ont résonné en moi. Sur l’éducation bienveillante. Sur le portage. Alors j’en ai parlé autour de moi. Au papa, qui m’a regardée comme une extra terrestre. A la nounou, qui a eu l’air de penser comme moi.
J’ai acheté une écharpe, et j’ai arrêté de claquer mes mains sur le postérieur rebondi de mon fils.
Alors bien sûr, j’ai échoué plusieurs fois. Mais j’avais commencé à ouvrir les yeux.

L’écharpe m’a fait mal au dos, mon fils n’y était pas bien. J’ai pris des cours.
J’ai souvent perdu mon combat contre la claque sur les fesses. Mais je n’ai jamais déclaré forfait.

Ma première maternité a été vécue en « pilote automatique ». Je ne me suis jamais posé de questions. J’ai agi comme on attendait de moi que je le fasse. J’ai écouté les conseils de ma famille, j’ai essayé de les appliquer, quoi qu’il m’en coûtait.
Peut être parce que la grossesse est arrivée très vite dans ma vie de jeune adulte, peut être parce que je n’étais pas préparée.
Peut être aussi que j’avais besoin d’apprendre à me connaître pour apprendre à devenir maman.
Mais ça ne me convenait pas. Alors quand j’ai entrouvert certaines portes et que j’y ai trouvé les réponses aux questions que j’ignorais même me poser, ç’a été le début du reste de ma vie de maman.

Ma deuxième grossesse a été prévue, celle ci. J’ai eu tout le loisir de faire le bilan de ma première expérience, et de chercher à savoir ce que JE voulais vraiment. Pour moi, pour mon enfant, pour notre famille.

J’ai été suivie par une sage-femme libérale qui n’a jamais mis ses doigts dans ma culotte avant le jour J. J’ai accouché en plateau technique, en 4h30 douche comprise, sans péridurale, et j’étais de retour à la maison deux heures trente après la naissance. Mon fils n’avait pas eu de soins intrusifs, il avait passé deux heures en peau à peau avec moi, il avait tété tout son soûl.

Je savais avant même sa naissance que je l’allaiterais et que cette fois ci je ne laisserais personne s’immiscer dans son éducation et dans nos choix.

Quatorze mois plus tard, il est toujours allaité, a été diversifié selon les principes de la DME (Donne, Maman, Encore!) , passe de longues heures dans l’écharpe de portage, aime se balader en poussette mais n’y a pas posé son princier séant avant le mois dernier. Il a toujours son lit dans notre chambre, bien qu’il en ait un aussi dans celle de son frère. Sa Majesté a deux résidences.

Il n’a pas eu de trotteur et porte un collier d’ambre.

Il est en couches lavables depuis la naissance, et de façon exclusive depuis ses 6 semaines.

Il n’a jamais eu de petits pots industriels.
N’a jamais eu de fessée, de séjour au piquet, de tapes sur la main.

Je crie beaucoup, c’est un fait. Mais moins. Et je m’excuse quand j’ai abusé. Et je cherche toujours à comprendre comment est arrivée la crise, et comment éviter la prochaine.

Je fais extrêmement attention aux sentiments de mes enfants. Les mots blessants, humiliants, sont bannis de notre foyer.

J’ai trouvé des auteurs en adéquation avec mes idées, et les lire m’aide chaque jour à m’améliorer.

J’ai rencontré des amies formidables avec qui partager ces idées, les moments de doute, et elles aussi m’aident chaque jour par leur présence.

Aujourd’hui, je passe pour une hippie laxiste et excentrique. je fais le désespoir de ma famille, je suis la risée de pas mal de monde.
Mais je suis enfin la mère que mes enfants méritaient.
Laisser s’exprimer la maman que je voulais être plutôt que de répéter des clichés entendus depuis l’enfance a fait de moi une maman plus disponible, plus à l’écoute. Une femme plus compréhensive et plus épanouie. Un être humain plus ouvert, tout simplement.
Cette deuxième maternité m’a révélée à moi-même.

Alors non, mon fils aîné n’est pas mort d’avoir hurlé pendant de trop longs moments avant de trouver le sommeil seul dans son lit. Non, il n’est pas mort d’avoir bu du lait en poudre. Non, il n’est pas mort d’avoir été puni, accusé de faire des caprices pour un rien.
Mais il dit lui même du haut de ses 5 ans que « c’est mieux maintenant ». Il feuillette Fillozat avec moi, qu’il appelle mon « livre pour être une meilleure maman », et me demande de lui en lire des passages pour « être un meilleur petit garçon ».

Parfois, bien sûr, je doute. Quand le Zébie se réveille tous les quarts d’heure la seule nuit de sa vie où son père et moi avons découché, je me demande si c’est de ma faute, si je ne l’ai pas trop habitué à squatter mon giron.
Quand Kiki quitte la pièce en hurlant que je suis « vraiment mais VRAIMENT trop énervante » et en claquant la porte, je me demande si ça craindrait vraiment, à ce moment là de lui en coller une toute petite, pour le faire taire.
Quand le Zébie, 14 mois et des patates, refuse de faire la sieste ailleurs que sur mon dos, je me demande s’il n’aurait pas mieux fallu lui apprendre à se détacher de moi.

Mais il finit par s’endormir, Kiki redescend me calîner après sa grosse colère, tout le monde souffle un bon coup, je les regarde et je sais. Je sais que nous avons fait le bon choix.

Que oui, le portage, l’allaitement et l’éducation bienveillante font des enfants autonomes et sociables.
Et que si le mien n’est pas encore comme ça, ça n’est pas à cause de moi. C’est juste un petit humain différent de son frère. Un petit humain qui a encore grand besoin de sentir sa maman tout prêt de lui pour se sentir rassuré.

Je te laisse, je dois aller hurler Filliozatement expliquer à mon fils pourquoi il faudrait VRAIMENT qu’il fasse la sieste s’il ne veut pas que je lui en colle une être fatigué cet après midi.

Source : http://media-cache-ec5.pinterest.com

« Le maternage proximal? Ca me paraît bien abusif !
-Comment va-t-il apprendre à marcher si tu ne le poses jamais?
-Mais il ne peut pas respirer là dedans!
-Il dort dans votre lit?? Mais c’est irresponsable !
-Mets le donc dans son lit !
-Il n’a pas besoin de manger autant!
-Si tu accoures dès qu’il pleure, il va te manipuler !!
– Hey ! Je me demande pourquoi ce bébé a l’air si heureux!